//Cookie and Intro Video Implementation

Considérations personnelles sur: 

LA COULEUR DES VERNIS ET SOUS-FONDS DE STRADIVARIUS

Les vernis

Les sept violoncelles d’Antonio Stradivari, exposés à Crémone en 2004 ont montré, au-delà d’un grand intérêt visuel et culturel, une grande variété de couleurs des vernis. Chaque instrument avait une couleur différente. Le livre de l’exposition le démontre clairement, même si les couleurs reproduites par les photos ne sont pas tout à fait exactes.

Extraits du livre de l’exposition j’ai fait ce photomontage qui témoigne de cette grande variété de couleur. Malheureusement il manque le violoncelle Batta un Stradivarius de 1714, qui n’était pas exposé. Il aurait apporté le témoignage d’un vernis d’une épaisseur inhabituellement grande et surtout d’un rouge pourpre impressionnant.

Cette constatation de variété de couleur est particulièrement intéressante, d’autant plus qu’ il s’agit du même luthier. On aurait pu imaginer que les vernis soient différents d’un luthier à l’autre mais pas à ce point là chez le même artisan.

Sur cette image on voit que les deux demi-fonds situés sur la droite sont de la même année (1732). Ceci est très intéressant. Sauf erreur de datation ou d’attribution, cela nous permet de penser qu’il s’agit d’un choix délibéré de Stradivarius de varier la couleur selon son bon vouloir et non pas de vernis significatifs de différentes périodes de sa vie. On sait cependant qu’il utilisait quand même moins de vernis variés au début de sa carrière que par la suite. A ses débuts son vernis était peu coloré, voire transparent et variait légèrement autour du jaune ambré, exactement comme le violoncelle de 1710 (à gauche de la photo). Dans les années 1690 il a introduit le rouge (voir son violon appelé le « Toscan » de 1690) puis quelques années plus tard, dans sa période appelé étonnamment « d’or » il utilisait toutes les teintes. Elles vont du transparent au brun foncé en passant par toutes les teintes des jaunes, des oranges et des rouges.

Les Sous-fonds

A regarder de plus près, on peut relever que non seulement le vernis pouvait être de différentes couleurs, mais aussi le sous-fonds. Entre le sous-fonds des deux violoncelles datés 1732,  l’un est jaune et l’autre brun roux. Stradivarius passait donc aisément du jaune clair (1732) au brun clair (1710) ou du gris-vert (1712) au brun roux (1732) suivant ses envies ou selon le désir de ses clients, voir suivant le bois utilisé qu’il laissait peut-être libre. Avec ses différents sous-fonds et ses différents vernis, on peut dire qu’il maîtrisait une vaste palette de tous les tons possibles.

Cette grande variété de couleur, surtout des sous-fonds, est typique du 18ème. Elle s’est considérablement uniformisée au cours du 19ème pour toutes se ressembler au 20ème. 

La technique pure, l’uniformité et la symétrie caractérisent le siècle passé. Le 21e marque le retour vers la diversité, vers la variété, vers la philosophie du « jamais deux fois la même chose ». J’appelle volontiers ce changement de cap comme « la renaissance de la lutherie ».

Actuellement une profusion de luthiers de très haut niveau proposent une lutherie personnelle haut de gamme et ceci dans pratiquement tous les pays du monde. Les prix de ces instruments ne font que monter depuis une vingtaine d’année. Les musiciens ont parfaitement compris où étaient leurs intérêts. Actuellement ils investissent en masse sur ce type d’instrument de très haute qualité et à des prix encore sans comparaison avec un ancien.

Exemple de deux sous-fonds + dichroïsme

De passage chez un collectionneur, dans le but de voir sa collection (stradivari, guarneri, etc.) et de lui montrer en même temps mes deux derniers violons construit sur les mêmes principes propres au 18 ème siècle, je fus surpris de la similitude de mes deux sous-fonds avec ces prestigieux instruments, que je voyais pour la première fois. Je me suis amusé de les mettre côte à côte et de les photographier dans les mêmes conditions. Bien entendu il ne s’agit pas de copie de ces instruments là.

Sur l’image ci-dessous, son présents deux couples de violons.

Les clairs à gauche et les fonçés à droite. Chaque couple est formé d’un Stradivari et d’un Girardin. La lumière venant de droite, les claires sont encore plus claires que dans la réalité objective.

Sur l’image ci-dessus, le couples clair a été déplacé à droite (dans l’ombre) et le couple fonçé a pris la place des claires à gauche (à la lumière). On constate que tous les violons ont presque la même couleur. 

Les Girardin réagissent au dichroïsme comme les Stradivari.

J’adore actuellement obtenir sur mes propres instruments toutes sortes de variations de sous-fonds et de vernis.

La différence vient essentiellement du bois  qui n’en fait qu’à sa tête, tel une « matière vivante. Je le laisse de plus en plus réagir à sa manière car je suis convaincu que ça fait partie de la vie qui n’est justement ni linéaire ni uniforme. Et ça m’arrange. Soit on accepte les réactions irrégulières du bois, soit on le force tel un bonzaï. Pour moi c’est une question de philosophie. L’ayant personnellement contraint pendant une vingtaine d’année je laisse actuellement beaucoup plus de place à la différence et au particularisme. C’est aussi le balancier de l’histoire, tantôt à droite tantôt à gauche. Comme je le disais plus haut, au 18ème on était dans la variété au 20ème dans l’uniformité, on retourne imparablement vers la diversité.